17 Septembre 2008
Chaque village de montagne possède ses alpages où une bonne partie de la population passe les trois mois d'été. C'est là que les troupeaux paissent tranquillement en journée et retournent soit dans leurs abris respectifs la nuit, soit dans des endroits aménagés autour des habitations.
C'est aussi ici que sont fabriqués les fromages, le yaourt, le beurre et le kaymak, ce délice réalisé à partir de la graisse contenue dans le lait.
Cemal teze, l'épouse de l'oncle Ismail, sépare la graisse du lait pour en faire du kaymak
Faute de temps, je n'avais pas eu l'occasion l'été dernier de découvrir les alpages d'Aşağı Aydere Köyü. Il était donc grand temps de remédier à cette lacune.
Nous y sommes montés assez nombreux ce matin-là, certains en voiture, afin de ramener des vivres, les autres à pied. Quelle que soit la façon dont on y grimpe, la route est difficile. Le véhicule butte sur les petits rochers qui parfois encombrent le chemin, traverse des cours d'eau, il faut s'arrêter régulièrement afin de laisser reposer le moteur mis à dur épreuve et vérifier qu'aucune partie ne soit endommagée.
A pied, ce n'est pas guère mieux, il faut grimper durant près de deux heures, parfois à travers les rochers. Mais quelle récompense au bout du compte lorsqu'en en contrebas d'un flanc de montagne, on aperçoit enfin au loin les alpages du village.
Les constructions au confort rudimentaire datent du XIXème siècle et sont en pierre. Elles sont constituées de deux parties accolées, l'une servant d'habitation, l'autre étant destinée au bétail.
D'ailleurs, c'est le moment d'envoyer les veaux au pâturage. Ils se fraient un passage entre les coqs, poules et oies qui encombrent la route.
Ils iront rejoindre leurs congénères qu'on aperçoit au loin, formant une tache de différentes couleurs dans le paysage.
C'est l'occasion de faire connaissance avec de nouveaux membres de la famille et de retrouver certains avec grand plaisir, telle qu'Hülya, une autre cousine d'Enver que j'ai eu l'occasion de revoir à Istanbul en automne puisqu'elle y habite.
Toutes les occasions sont bonnes pour manger... et goûter par exemple au helva maison et au kaymak qui n'a absolument rien à voir avec celui que je connais à Istanbul, deux délices de plus !
Hülya coupe des parts de helva
Je peux enfin rencontrer Cemal, l'épouse de l'oncle Ismail, celle-ci descendant peu au village durant la belle saison, forte occupée à ses activités quotidiennes qui nécessitent beaucoup de temps.
Aussi adorable que son mari, elle affiche un sourire angélique qui ne laisse aucun doute sur sa gentillesse.
Je ne connaissais pas encore Muhübbet hanım, la charmante kaynana (belle-maman) d'Enver qui, elle aussi, passe la majeure partie de l'été dans les alpages.
Dans cet univers plutôt féminin, Ferman, le mari de Tamile, et leur fils Fatih, sont bien tranquilles, on ne les entend presque plus... assis près du poêle et de la cheminée où l'on cuit habituellement le pain.
Il est hors de question d'arriver chez quelqu'un sans être aussitôt invité à partager un repas et avaler au moins quelques thés.
Dans les maisons des alpages, il n'y a qu'une seule pièce à vivre où tout le monde se retrouve, tant en journée que la nuit. L'espace est somme toute assez petit, selon le nombre de personnes qui s'y trouvent.
Il y a de nombreuses visites à faire, en particulier à la joyeuse Süsi entourée de ses deux filles, Tamile et Muazzez, qui ne manquent pas de lui prodiguer beaucoup de tendresse.
Mais comme toujours, les heures s'écoulent bien trop vite. Le ciel s'assombrit et l'orage menace, il est urgent de prendre congé pour ne pas se retrouver en pleine nature au mauvais moment.
Les séparations nécessitent toujours un certain temps, nous voilà en plein orage et la grêle s'abat sur nos têtes, après avoir parcouru une bonne moitié de la route seulement.
Et ce que craignait Ferman arrive, nous voilà embourbés dans le chemin, les roues patinent... Il faut attendre que l'orage passe tant il est violent pour tenter de sortir du bourbier, sans succès. Heureusement, comme par miracle, un tracteur apparaît ... et nous sort de ce fameux guêpier.
Je n'ai pu m'empêcher d'immortaliser ces instants où les nerfs des hommes ont été mis à rude épreuve. Heureusement, nous sommes finalement rentrés sans encombre, juste les vêtements bien salis et mouillés...