14 Décembre 2010
A une vingtaine de minutes en bateau à moteur de la proche et agréable cité de Dalyan visitée ensemble récemment, le site antique de Kaunos offre aux visiteurs un voyage sur les traces d'une ville antique autrefois importante.
Les dernières demeures de ses souverains successifs ne sont autres que les tombes lyciennes creusées dans la roche sur la rive nord de la rivière Dalyan.
Sur l'emplacement du temple voisin de l'agora à Kaunos
Si Kaunos existait visiblement déjà au IX ou au Xème siècle av. J.-C., les informations recueillies grâce à Hérodote mettent en exergue l'importance de Kaunos tant du point de vue géographique que politique en 540 av. J.-C.
Selon l'historien grec, le dignitaire Mède Harpagos mène cette année-là une expédition contre les Cariens, les Cauniens et les Lyciens. La Carie, tout comme la Lycie, sont alors de grands territoires incluant de nombreuses villes et villages et le nom de la cité est mentionné comme un territoire propre entre les deux précités.
Depuis 1967, des fouilles sont menées par les archéologues turcs
Kaunos est le centre d'un territoire portant le même nom et incluant un certain nombre de villes et villages sous son contrôle. Revendiquant une origine crétoise, les fondateurs de la ville sont néanmoins des peuplades d'Anatolie. De par leur langue, leurs coutumes et traditions et leur religion - ils ont leurs propres dieux -, ils se distinguent de leurs voisins en formant ainsi un groupe anatolien bien particulier.
Grâce aux découvertes archéologiques, on sait que Kbid sera le premier nom connu de cette cité, utilisé jusqu'à la fin du 6ème siècle av. J.-C. La ville est rebaptisée Kaunos après sa colonisation par les Hellènes à la fin du 4ème siècle av. J.-C. En 387 av. J.-C,. après la signature d'un traité de paix, Kaunos est dirigée par la dynastie locale des Hecatomnids et désormais une ville carienne.
L'escalier qui permet de descendre vers l'agora et le temple
Durant la période chrétienne, son histoire sera longue et importante. Pendant la période de l'antiquité tardive, Kaunos reste dans l'empire Romain oriental et adhère à l'église lycienne jusqu'au milieu de la période médiévale, période durant laquelle elle porte deux noms Kaunos-Hagia.
Le peuple habitant là est décrit comme "malsain, au teint verdâtre" en raison de la malaria, grandement favorisée par les lagunes alentours infestées de moustiques.
Durant sa période de gloire, la ville possède deux ports, un à usage militaire, l'autre pour le commerce des marchandises, notamment celui du sel... et des esclaves. L'ensablement de la rade à la fin de l'époque byzantine sera fatale à l'économie de Kaunos.
Les ports s'élevaient là, la mer depuis s'est retirée considérablement
Et si nous allions approfondir ensemble la découverte de ce site au charme indéniable.
Le théâtre romain, occupé aujourd'hui par les chèvres, d'une capacité de 5000 places, se révèle bien conservé et particulièrement imposant avec ses 76 m de diamètre. Des arches situées au nord-est et au sud-est permettent d'accéder à la scène, malheureusement disparue aujourd'hui.
Du haut des gradins, la vue s'étend d'un côté vers les montagnes avoisinantes, de l'autre jusqu'à la mer
Une chèvre, parmi tant d'autres, accepte de prendre la pose...
Depuis 1967, des fouilles sont menées par les archéologues turcs en partenariat avec l'Université Başkent à Ankara qui met d'ailleurs en place progressivement d'intéressants panneaux explicatifs permettant de connaître l'avancée des travaux et de se faire une idée de certains lieux avant et après les fouilles...
A côté de l'entrée du théâtre, des travaux récents ont permis d'exhumer une fontaine intéressante.
En contrebas du théâtre se profilent les restes de la palestre où était enseigné et pratiqué l'athlétisme. Juste à côté se trouvent les ruines d'une église byzantine du VIème siècle appelée "l'église au dôme", constituant un des exemples les mieux conservés de cette époque et de ce type en Anatolie.
Kubbeli kilise ou l'église au dôme
Le bâtiment, de plan carré, comprend trois travées dont celle au centre était surmontée d'un dôme, les autres étant voûtées. L'accès se faisait par trois portes situées à l'ouest. Les chapelles attenantes côté ouest ont été ajoutées ultérieurement.
L'intérieur de l'église au dôme - site de Kaunos
De superbes mosaiques mises au jour lors des fouilles peuvent être admirées.
Détail de mosaique - Kaunos
La balade se poursuit par un escalier qui dévale vers une plate-forme occupée par de nombreux vestiges.
Le plus imposant est celui du temple érigé là durant la seconde moitié du 1er siècle de notre ère sur une terrasse artificielle donnant sur l'agora et le port. La cour, de 30,50 x 35 m, ceinte d'une galerie de colonnades, abrite un temple de près de 10 m x 7 construit en hommage à Zeus Soteros.
Terrasse surplombant l'emplacement de l'ancien port de Kaunos
La structure en demi-lune pourrait être un sanctuaire. Une construction de forme pyramidale et d'une hauteur originale de 3,50 m semble correspondre à une pierre vénérée, considérée comme "la maison de Dieu", en référence à Basileus Kaunios, dieu-roi de Kaunos, qui n'a pas de représentation figurative.
Un peu plus en contrebas, au sud-est de l'agora du port, se trouve le nymphée romain dédié à l'empereur Vespasien, découvert en 1969, et dont la restauration, selon la configuration initiale, a commencé en 2005.
Sur cette fontaine qui a servi durant environ quatre siècles, des inscriptions sur la façade donnant sur le port révèlent le règlement douanier de celui-ci et donnent une idée précise sur l'importance de la vie économique de la ville.
Le nymphée romain en cours de restauration
Après avoir déambulé dans l'agora de taille conséquente, un tour du côté des thermes romains s'impose. Ils permettent de se faire une idée assez précise de leur ampleur et de leur prestance.
Les thermes romains de Kaunos
Bien d'autres ruines, de moindre importance, disséminées au milieu de la végétation, méritent néanmoins qu'on s'y attarde.
Une visite approfondie du site nécessite au bas mot deux bonnes heures, compte-tenu de l'étendue de celui-ci. Les paysages alentours offrant de très belles vues, il fait bon s'arrêter régulièrement pour diriger son regard tant en direction de la mer que des montagnes environnantes.
Je vous propose de terminer cette visite en images par ce diaporama.