7 Septembre 2011
Dans le quartier d'Ayvansaray entouré par les murailles historiques de la vieille ville d'Istanbul, des cloches retentissent soudain allègrement, déchirant le silence matinal.
Dans l'église Panaya Suda d'Ayvansaray à Istanbul
Après avoir contourné un mur qui à laisse à peine entrevoir ce qui se cache derrière et dépassé l'ancienne porte principale, on emprunte une entrée plus petite qui permet de voir d'où provient le carillon.
La main qui permet d'actionner les cloches
C'est celui de l'église grecque orthodoxe Panaya Suda, appelée aussi Meryem Ana kemeri kilisesi, autrement dit "l'église de la ceinture de la Vierge Marie".
Détail de l'iconostase de Panaya Suda kilisesi
Panaya Suda fait partie des 180 églises orthodoxes que comptait Istanbul il y a un siècle, lorsque la population d'origine grecque dépassait 200 000 âmes.
L'histoire des lieux remonte en fait bien plus loin dans le temps. Selon l'historien Theophanes, un fou qui a voulu se tuer est emprisonné là en 810 par l'empereur Nicéphore 1er.
Bien plus tard, dans un inventaire appelé liste Tryphon et datant de 1583 figure Payana Suda.
Détail de l'iconostase de l'église de la ceinture de la Vierge Marie
De même, l'historien français Charles du Fresne, appelé Sieur du Cange, recense l'église lors de sa venue à Constantinople au XVIIème siècle. Il la mentionne sous le nom de Theotokos Eğri Porta, faisant référence à la toute proche porte d'Eğri située dans les murailles.
Derrière une des portes de l'iconostase...
En 1764, sur la liste des églises et écoles de ce secteur réalisée par le patriarche Samuel, elle figure en tête sous le nom de Panaya Eğrikapı.
Détail de l'iconostase dans l'église Panaya Suda d'Istanbul
Plusieurs inscriptions visibles sur place indiquent que ce lieu de culte a été reconstruit à deux reprises, dont la dernière fois au XIXème siècle, apparemment en 1830. Il se pourrait qu'il ait été rebâti en lieu et place d'une église portant le nom de Nikita.
Bartholomeos 1er, patriarche oecuménique de Constantinople, officie en ce 31 août
Sur le côté est, un escalier permet d'accéder à un ayazma, à savoir une source sacrée, spécificité des églises orthodoxes.
Ces fameuses sources constituaient souvent les dépôts d'eau pour la ville et avoir ainsi le contrôle de ce bien si précieux et d'en être le gardien conférait un pouvoir important à l'église.
La source de l'église Panaya Suda à Ayvansaray
Tous les ans, le 31 août, on fête la ceinture de la Vierge et Bartholomeos 1er, patriarche oecuménique de Constantinople, officie pour l'occasion. Dans l'assistance, des fidèles d'origine grecque et roumaine se retrouvent là.
Durant la liturgie célébrée par Bartholomeos 1er
Hormis la représentation du Christ Pantocrator qui orne le plafond, de nombreuses icônes, dont certaines abîmées par le temps, représentent des scènes évangéliques telles que l'ascension, le baptême par Jean-Baptiste ou la première entrée de Jésus-Christ dans l'église porté par Saint-Siméon et entouré par la Vierge Marie et Anne, mère de Marie.
Présentation de l'enfant Jésus porté par Saint-Siméon
Une autre icône de toute beauté, recouverte d'argent, montre la Vierge, Saint-Nicolas et l'apôtre André.
La Vierge, Saint-Nicolas et l'apôtre André
Scènes inférieures représentées sur l'icône
Le temps semble s'être arrêté dans cette église totalement ignorée des touristes, à l'abri des regards, dans un quartier peu connu de la ville dont pourtant l'histoire fut très riche.
Autre détail de l'iconostase
Une icône rongée par le temps...
Istanbul abrite encore bien des richesses pour qui prend la peine de les chercher...
Sources historiques : "Istanbul'da Tanzimat öncesi Rum Ortodoks kiliseleri" de Zafer Karaca