18 Avril 2011
Le premier cinéma d'Istanbul du nom de Pathe, situé sur l'avenue Meşrutiyet parallèle à celle d'Istiklal, a ouvert ses portes en 1908. Au fil des années, il change de nom à plusieurs reprises, le dernier étant Ses sineması. Jusqu'en 1930, plus d'une centaine de cinémas ont pignon sur rue à Beyoğlu.
En avril 2005, j'ai recensé les différents cinémas du quartier qui se montaient à l'époque à 12 enseignes abritant une trentaine de salles sur une distance de 600 mètres à peine.
Yeşilcam sıneması, une salle de moins de 100 places au sous-sol
Bien avant mon installation à Istanbul, il y en avait beaucoup plus encore dans le quartier : au début de l'avenue Siraselviler se trouvait Venüs, dans l'immeuble du Cercle d'Orient sur İstiklal Caddesi, les cinémas Saray et Lüks avaient élu domicile ; dans la même petite rue qu'Emek sineması se trouvait également Yeni Ar. Sur la trépidente artère principale feu l'Elhamra ouvert en 1923, un peu plus bas à gauche il y avait les salles de Yeni Melek. Le jardin supérieur du lycée de Galatasaray abritait un cinéma de plein d'air ouvert en été.
En remontant encore le temps, les enseignes telles qu' Apollon, Majestik, İpek, Şık, Ses, Glorya, Luksenburg, Eclair, Americain, Santral, Oryanto, Parlant, Etoile, Opera, İpek, Kozmograf, Majik et Cine Palace accueillaient les amateurs de film en tous genres au coeur de la vie culturelle d'Istanbul qu'est Beyoğlu.
Aujourd'hui, dans chaque nouveau centre commercial, un complexe multimédia dernier cri y trouve sa place... au détriment de tous ces petits cinémas de 2-3 salles en moyenne, réparties sur plusieurs niveaux, qui permettaient à chacun de trouver son compte, proposant selon l'endroit, les dernières nouveautés locales, mais également des films étrangers , des films d'art et essai ou d'autres réservés plutôt à la gente masculine...
Un minuscule cinéma... réservé plutôt à la gente masculine
L'Alkazar sur İstiklal Caddesi, qui a ouvert ses portes en 1923 sous le nom d'Elektra dans un bâtiment construit entre 1918 et 1920, a tiré le rideau fin février 2010. Il ne subsiste plus que les deux statues de femme de part et d'autre de l'ancienne étroite entrée. Le bâtiment a été vendu et devrait abriter sous peu un magasin de sport.
Il était une fois l'Alkazar à Istanbul...
C'est un projet de centre commercial en lieu et place du cinéma Emek, qui s'appelait dans le temps Melek - L'ange - a contraint ce dernier à fermer définitivement en avril 2010. Le bâtiment devrait être démoli mais pour l'heure, les tribunaux ont gelé ledit projet suite à la production de différents rapports présentés par les opposants.
Hier soir, près d'un millier de personnes, parmi lesquels se trouvaient plusieurs acteurs, réalisateurs et metteurs en scène, ont défilé de Taksim jusqu'au cinéma en brandissant plusieurs affiches dont "Emek bizim, İstanbul bizim” - Emek est à nous, Istanbul est à nous.
Une pancarte sur laquelle était inscrite “Emek’ten çıkın Demirören’i yıkın” - Sortez d'Emek, détruisez Demirören" a été accrochée à l'intérieur du centre commercial Demirören voisin - qui vient d'ouvrir ses portes il y a quelques jours à peine - par les manifestants. Devant la porte du cinéma, un rideau rouge a également été posé.
Manifestation du 18 avril 2011 contre la démolition d'Emek sineması - photo du journal Milliyet
Rüya (anciennement Sümer), sur Istiklal Caddesi, situé juste à côté de la célèbre pâtisserie İnci, a été durant 34 ans le cinéma porno le plus célèbre d'Istanbul avec son célèbre slogan "Deux films pour le prix d'un".
Après environ 18 mois sous l'enseigne Yeni Rüya présentant des films plus "conventionnels",
il a mis la clé sous la porte le 8 mai 2010, à cause de difficultés financières et aussi pour la même raison qui a provoqué la mort du cinéma Emek.
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On ne rêve plus depuis la fermeture de Rüya sineması...
Aujourd'hui, il reste encore 6 enseignes au lieu des 12 comptabilisées en 2005. Cinepop est menacé d'une mort prochaine. Est-ce que ce sera le prochain sur la liste ?