3 Novembre 2009
Hormis leur réputation pour le travail de l'argent, les syriaques de Tur Abdin, cette région du sud-est de la Turquie appelée "la montagne des serviteurs de Dieu", ont également toujours été réputés pour celui de la pierre.
Un bloc de pierre ciselé par l'homme
Cette matière noble qui garde la fraîcheur en été et la chaleur en hiver, extraite des carrières situées dans les collines proches de la ville de Midyat, est transformée et utilisée par des mains d'or pour donner ensuite fière allure notamment aux demeures et aux églises des environs.
Artisans à l'ouvrage à Mydiat
Ce sont aujourd'hui en majorité des musulmans qui continuent à faire perdurer cet art qui a failli s'éteindre en même temps que les cinq anciens maîtres-artisans syriaques qui oeuvraient encore là il y a 15 ou 20 ans de cela.
En 1999, Feyzullah Özcan, gouverneur de la province de Mardin, fait ouvrir un atelier accueillant dix ouvriers dans le centre de Mydiat pour perpétuer ce métier artisanal en voie d'extinction et propre à la région.
Tailleur de pierre à Midyat
Dix ans plus tard, lors de ma visite, on perpétue à présent dans une quizaine d'ateliers le savoir-faire ancestral des chrétiens d'Orient de Tur Abdin.
A la sortie de Midyat, sur la route de Mardin, 35 personnes dont une vingtaine d'apprentis, travaillent ici, dans cette entreprise initialement installée en 2006 dans le centre-ville par un autre gouverneur du nom de Mustafa Yılmaz.
Des centaines de kilos de pierre calcaire sont transformés ici
Tous les jours, 40 à 50 blocs de katori taş - pierre calcaire - pesant chacun entre 150 et 250 kg, sont acheminés ici après avoir été extraits à la machine de leur milieu naturel.
Recoupés sur place, ils vont ensuite prendre forme entre les doigts des tailleurs qui martèlent, cisèlent, embellissent au gré des commandes.
Cet atelier ne manque pas de travail, bien au contraire. En 2007, il a réalisé le centre culturel de Mardin qui a représenté plus d'un an de main d'oeuvre.
La réputation des tailleurs de pierre de Midyat dépasse les frontières de la Turquie.
La salle des machines où l'on recoupe les blocs livrés
Les artisans turcs sont allés réaliser des commandes en Belgique.
Une semaine avant mon passage en mai 2009, une équipe s'est rendue en Allemagne pour démarrer un chantier dans une église. Le matériel a été acheminé auparavant par voie maritime et terrestre, les artisans sont partis un peu plus tard.
En Turquie, l'Etat, les municipalités, mais aussi les communautés religieuses, musulmanes ou chrétiennes, voire quelques particuliers, fournissent du travail aux tailleurs.
Que ce soit pour réaliser un baptistère dans une église de la région - comme c'était le cas aussi à l'époque - ou pour construire une mosquée en pierre près de la gare routière de Midyat, le travail ne manque pas !
Trois à cinq mois de travail pour construire cette mosquée en pierre de la région à Midyat
Cet atelier a également réalisé la restauration pendant 15 mois de l'église syriaque du proche village de Yeni İşli.
Lorsque vos yeux admirent la pierre omniprésente dans cette région de la Turquie, c'est une récompense permanente pour ceux qui ont contribué à cet art ancestral ainsi préservé et qui permet de fournir du travail à de nombreux habitants.