17 Décembre 2010
Reportage réalisé avec le concours de Yves-Marie LAOUENAN et de
Après avoir pris connaissance de l'histoire complexe et mouvementée de Xanthos, c'est une longue balade sur place que je vous propose aujourd'hui.
Si Xanthos représente avant tout un héritage unique laissé par le peuple de Lycie, les vestiges visibles de nos jours ne reflètent pas toujours, pour le non-initié, la grandeur de celui-ci.
A droite du sarcophage surélevé, un monument peu banal, le pilier des Harpyies
La langue des Lyciens, gravée sur pierre, peut être déchiffrée en partie par les linguistes car l'alphabet lycien est dérivé du grec avec quelques adaptations.
Un très bel exemple apparaît sur le "Pilier inscrit" situé près de l'entrée de l'agora et raconte visiblement l'histoire de la dynastie harpagide, tirée du nom de Harpage mentionné dans la première partie de l'article consacré à Xanthos.
Le "Pilier inscrit"
Le "Pilier inscrit", sur lequel des inscriptions recouvrent les quatre faces, repose sur un soubassement de deux degrés ; la hauteur totale originale de ce monument, dont les pièces du haut sont aujourd'hui cassées, atteignait 8,50 m.
La partie inscrite, représentant à elle seule 4,04 m de haut, supportait une chambre funéraire sur laquelle reposait une sorte de trône en pierre comportant des accoudoirs ornés de têtes de lions.
Le travail remarquable de la pierre, autre caractéristique des Lyciens, peut paraître moins "visuel" que celui effectué par les Romains et les Byzantins, et pourtant...
Partie inférieure d'un pilier funéraire en limite de l'acropole lycienne permettant d'avoir un aperçu de la finesse du travail effectué ; le haut a disparu, recouvert par le rempart byzantin
Hormis les sarcophages aux configurations habituelles et connues visibles sur le site de Xanthos, l'un d'entre eux, le pilier des Harpyies, le plus ancien d'ailleurs, daté de 480 av. J.-C. environ, présente des caractéristiques originales.
Des créatures monstrueuses, mi-femmes, mi-oiseaux, identifiées aux Harpyies de la mythologie grecque, ornent les bas reliefs de marbre blanc. Le style de ces décors laisse à supposer que le sculpteur était grec. Ce tombeau a abrité le corps d'un souverain lycien dont le nom n'est malheureusement pas connu.
Sculptures mises en scène figurant sur le haut du pilier des Harpyies - photo crédit Francis Prost
En contrebas de l'acropole lycienne, et tout à côté du pilier des Harpyies ainsi que du sarcophage élevé, se dresse le théâtre romain de 8000 places construit au IIème siècle ap. J.-C.
Un premier théâtre avait été érigé là et dont il ne subsiste aujourd'hui que de maigres traces.
Sur les gradins du théâtre de Xanthos
Certains endroits, tels l'agora romaine face au théâtre ou le secteur appelé "centre ville", au sud du decumanus - l'axe principal est-ouest de la cité romaine, font l'objet depuis cette dernière décennie, de fouilles importantes.
Même si ces dernières ont permis la mise au jour d'un ensemble important de traces de l'époque romaine, les visiteurs auront sans doute un peu de mal à apprécier visuellement l'importance de ces découvertes.
L'agora supérieure du secteur romain appelé "centre de la ville"
Si les monuments de Xanthos les plus proches les uns des autres peuvent être visités rapidement en une bonne heure, le curieux ne manquera pas de consacrer trois heures pour une visite plus approfondie du site.
Cela lui permettra de découvrir une partie des 25 ha du site qui s'élève notamment sur la colline de la face nord, abritant une nécropole lycienne digne d'intérêt.
Quelques unes des tombes rupestres lyciennes traditionnelles de la nécropole de la colline
Avant de grimper sur le flanc de la colline, on peut admirer un monument funéraire appelé "sarcophage des danseuses".
Très abîmé visiblement par des actes de vandalisme à l'époque moderne, il a fait l'objet d'une récente restauration qui lui aura permis de retrouver une partie de son prestige.
Une scène de guerre sculptée sur le côté est du couvercle
La partie longiligne du couvercle, orné de quatre tenons représentant des têtes de lion, est habillée de différentes scènes.
Les deux côtés latéraux comportent d'élégants personnages féminins face à face, vêtus de chitons, et qui semblent effectuer des danses rituelles religieuses, sans doute funéraires.
Danseuses ayant donné leur nom au monument
Plus haut, dans la montée, la tombe aux lions se révèle dans toute sa beauté, que finalement peu de touristes prendront le plaisir d'admirer, faute de consacrer du temps à cette partie du site.
La tombe aux lions
Le bas-relief, de toute beauté, datant du IVème siècle av. J.-C., représente un taureau attaqué par deux lions.
La scène, saisissante de vérité, ne peut que ravir les yeux, tant les détails sont particulièrement travaillés.
Détail de la tombe aux lions dans la nécropole lycienne de Xanthos
Au hasard de la promenade, différents sarcophages apparaissent çà et là, au milieu de la végétation.
Une tombe parmi tant d'autres
Le haut de la colline permet au visiteur de découvrir, en un lieu unique, les trois types de sépultures caractéristiques de la Lycie classique.
Le "Pilier de l'acropole" domine les tombes rupestres
Hormis le "Pilier de l'acropole" du milieu du IVème siècle av. J.-C., à priori dernier ouvrage de ce genre réalisé par les Xanthiens, d'une hauteur totale de 7,49 m, se trouve un ensemble de tombes rupestres familiales bien conservées.
Juste en face, le socle d'un sarcophage, appelé de Payava, nom du Xanthien dont il aura été la dernière demeure, apparaît dans toute sa nudité.
Le sarcophage de Payava
Les parties supérieures du monument, à savoir les bas-reliefs de la base, la cuve et le couvercle, ont été emportées au XIXème siècle à Londres. Il faut tenter d'imaginer ce que pouvait être cet ouvrage dont la hauteur atteignait... 7,85 m.
Il est impossible de présenter en aussi peu de lignes la totalité des tombes en tous genres de Xanthos. Toujours est-il que ce serait bien dommage de ne pas faire un détour par cette nécropole qui permet en outre, de jouir d'une vue panoramique sur l'acropole lycienne, le théâtre et l'agora.
Vue panoramique d'une partie du site de Xanthos visible du haut de la colline
De même, les amateurs de mosaïques seront gâtés. En effet, des surfaces importantes au sol en sont recouvertes, certaines visibles facilement, d'autre moins.
Dans l'acropole lycienne, des formes et dessins géométriques ou des décors végétaux, parfois de couleur (bleu, blanc, rouge...), ornent de vastes surfaces sur les sols des demeures.
Détail d'une mosaïque de l'acropole lycienne
Dans le secteur byzantin de la cathédrale, la décoration se révèle par endroits dans toute sa splendeur.
Sous le bidim protecteur, de merveilleuses fresques recouvrent une bonne partie du sol
Une des plus belles compositions, est sans conteste ce superbe lapin de petite taille, également situé dans ce secteur, et qu'on finit par trouver après avoir minutieusement observé le sol de part et d'autre.
Résumer les milliers d'années d'histoire se trouvant à Xanthos n'est guère aisé, mais se laisser aller à rêver à ces civilisations prestigieuses qui en ont fait la grandeur me semble plus facile.
Faire revivre, avec un peu d'imagination, ce que pouvait y être la vie, tant du haut de l'acropole lycienne, que de la voie romaine ou encore des alentours de la cathédrale, permet d'achever en beauté la visite des lieux.